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Ago quitte finalement la capitale direction Los Yungas, une vallée fertile située entre les ravins du flanc nord-est de la Cordillère Réale. Après 26km, soit une heure de voiture, on passe la Cumbre, le point le plus haut sur le chemin de Los Yungas. A 4600 mètres d’altitude, ce point est toujours enneigé. Il faudra encore 2 heures avant d’arriver à destination.
Ensuite c’est la descente et le paysage change rapidement. L’air devient plus tiède et la végétation se transforme: on entre dans des vallées tropicales et humides avec de grandes montagnes couvertes de végétation dense. Selon les guides touristiques, cette région est riche de d’orages, de mandarines, de pamplemousses, de citrons.
Mais Ago: ” Franchement je n’ai pas vu tout cela. Au marché ou dans le échoppes non plus, pas une grande variété. Autrefois cette région était vraiment le verger de la capitale et des régions peu fertiles. En se baladant dans la forêt tropicale on remarque souvent un odeur agréable mais un peu amer. Puis on se rend bien compte qu’ici la culture la plus répandue est celui des feuilles de coca. On remarque un panneau, interdition d’entrer. Une multinational y produit des herbes médicinales et il faut faire attention aux chiens qui surveillent les cultures”.
Les feuilles de coca oui, la Cocaïne no ! Voici le slogan du président Morales. Or comment contrôler que ces feuilles soient utilisées pour faire le maté de coca, traditionnellement machées et efficace pour combattre les maux dus à l’altitude, plutôt que pour produire des kilos de poudre blanche ? Bien sur, il y a des contrôles mais les casernes sont souvent désaffectées et on peut bien se douter de la corruption des fonctionnaires…
On raconte que dans l’Alto, à La Paz, il existe tout un réseau de famille qui effectue le processus de transformation, relativement simple, et “maison” .
On propose aux familles d’acheter le matériel nécessaire; four, mixer, centrifugeuse…et autres bricoles. On leur fourni les feuilles et toute la famille se met au travail. En quelques mois l’investissement est amorti et c’est que du bénéfice. Tout cela dans la banalité la plus totale, on n’a presque pas l’impression d’exercer une activité illégale.
Mais bien sur à Coroico on vous parlera d’herbes médicinales et si vous cherchez des feuilles on vous en demandera l’utilisation.
Malgré tout big brother vous contrôle.
La jeunesse paceña (de La Paz) suit avec entrain tout sorte de cours universitaires, que cela soit dans le privé -pour y accéder il suffit alors de payer- ou dans le publique où l’accès se fait au travers d’un examen. Ceux qui peuvent se le permettre préfèrent souvent s’inscrire dans les structures privées. Dans le publique les enseignants ne sont pas toujours présents: leurs salaires ne sont selon eux pas à la hauteur de leurs prestations et qualifications, et entre ces absences, les grèves et le manque de matériel les programmes ne sont pas bien développés. Aussi, le peu d’entreprises qui embauchent tendent à recruter à la sortie de cursus privé. A tort, soutien José. Lui qui fréquente la fac publique de chimie, estime que le secteur publique accueil des jeunes qui viennent de familles modestes, et ils ont bien souvent une grande volonté de s’en sortir et se dédient à leurs études avec passion. Ce sont de bons étudiants et de vrais professionnels encore plus motivés que leurs collègues du privé qui se contentent bien souvent de suivre les cours parce qu’ils les ont payés…parfois très cher.
Mais en général, dans les deux cas, cette jeunesse guette une chance de partir à l’étranger surtout pour pouvoir se spécialiser. Ils considèrent que leurs niveaux n’est pas très élevé et que quelques années passées en Europe ou aux Etas Unis, ou encore à Cuba, en Argentine ou au Brésil, pourrait leur donner une meilleure qualification. Surtout dans la perspective de rentrer au pays pour aider à son « desarrollo », son développement.
En tout cas beaucoup d’entre eux sont confiants, et l’époque de la grande migration bolivienne vers d’autres pays semble derrière eux. Le futur est prometteur.
Agostino vient de quitter l’Argentine et se trouve maintenant à la Paz en Bolivie, pays de Jesus et de Dorkas, personnages que nous avons commencé à suivre ici à Genève.
La Paz, il faudrait plutôt l’appeler Nuestra Señora de La Paz, ou Chuqiyapu en langue Aymara, la langue maternelle de notre amie Dorkas que certains estiment avoir été la langue officielle de l’empire Inca.
Agostino raconte: “on m’avait beaucoup prévenu sur le chaos, la pollution, mais enfin il me semble qu’avec un million d’habitants (le double si on compte la municipalité de El Alto, 400 mètres au dessus de la Paz) la ville s’en sorte par mal. Certes, il y a des moments de la journée ou se déplacer devient problématique, mais cela est typique à la plupart des grandes capitales dans le monde. Et puis depuis bientôt deux ans un très long téléphérique relie la partie sud de la capitale, plus riche et résidentielle, à la partie Nord d’El Alto, plus «populaire» voir plus pauvre. Le téléphérique, qui en d’autres villes est plutôt utilisé par les touristes, est ici très fréquenté par la population locale: en tout ce voyage qui traverse toute la ville dure 1heure et demie, une alternative au minibus qui prend un temps indéfini”.
Eh oui, ici pas possible de développer un réseau métro, pas même une ligne. Avec une morphologie pareil, avec des montées et des descentes infinies, même les taxis ont bien du mal et ils semblent vouloir rendre l’âme d’un moment à l’autre.
Comme dans beaucoup de grandes villes d’Amérique latine, les contrastes et les contradictions ne manquent pas. On se retrouve parfois dans des lieux qui bénéficient d’investissements énormes (de quelle provenance?) qui donnent un air de prospérité et de pays développé…et puis il suffit de se déplacer de quelques “quadras” (bloc de maisons) pour replonger dans un climat de pauvreté typique d’un pays « en desarrollo », où les gens sont perpétuellement à la recherche des ressources qui leurs permettront de survivre.